Dimensions
Longueur (nagasa) : ~ 75 cm
Courbure (sori) : 2.15 cm
Largeur à la pointe (sakihaba) : 24 mm
Largeur à la base (motohaba) : 33 mm
Épaisseur (kasane) : 6.2 mm
Poids (omosa) : 780g
Certificat d’authenticité
NBTHK Tokubetsu Hozon Tōken
« Œuvre à préserver particulièrement»
Description
Cette pièce superbe, forgée et signée en niji-mei par le célèbre Sukemune (助宗) date de l’ère Tenbun (1532-1555). Elle peut être considérée comme un exemple représentatif de nihontō utilisé par les samuraï de haut rang durant la sanglante période Sengoku (1467-1600). La construction de la lame dont la soie demeure inaltérée (ubu), se caractérise par un sugata typique de la fin Muromachi, en shinogi-zukuri arborant un saki-zori profond avec un imposant mihaba, un chū-kissaki assez long, ainsi que deux bō-hi courant sur tout le shinogi-ji.
Le grain de l’acier revêt un forgeage (kitae-hada) équilibré et très visible, révélant par endroits un itame assez rugueux et par d’autres, un tourbillonnant mokume. On peut également observer sur la surface de la lame une constellation de nie formant une multitude de chikei, qu’un éblouissant shirake-utsuri, caractéristique majeure des lames du Mino-den de cette période.
La ligne de trempe (hamon) est lumineuse et constante. Elle évoque les influences très présentes d’autres écoles, notamment celles du Sue-Sōshū et de Mino sur le travail de cet artisan. On y retrouve donc un hamon en ko-nie très fin, se structurant autour d’un midare-ba complexe, prenant la forme d’un gunome-choji enrichi de nombreux petits ashi sur tout le monouchi, pour se transformer progressivement en ko-gunome avec quelques togari sur le reste de la lame. l’activité de bon nombre de sunagashi et de kinsuji, complétent la richesse de cet hataraki. Enfin, on peut observer une trempe de la pointe (bōshi) en midarekomi et fortement hakikake.
La monture (koshirae) qui accompagne ce katana remonte à la fin de l’époque Edo. Ce très bel ensemble dans le style Shonai, possède des éléments « en suite », incrustés en iroe-zōgan et dont leurs thème floral évoque des feuilles de Paulownia (Kiri) . À ceux-ci, s’ajoute un fourreau (saya) laqué, d’une couleur rouge sombre avec une finition lisse et perlée d’un bleu azur, ainsi qu’une bélière (kurigata) ornée en argent en motif de dragon. Enfin, on peut remarquer l’embellissement de la poignée (tuska) par la présence de menuki prenant la forme de phœnix dorés en plein vol.
Partie généalogique de l’école Shimada (XVe et XVIe siècles)
Artiste et école
Bien qu’il y eut plusieurs générations d’artisans portant le nom “ Sukemune” entre le XVe et XVIe siècles, le plus fameux reste celui qui œuvra entre l’ère Tenbun et l’ère Eiroku (1532-1570). En effet, de son nom civil Gojō Kyūzaemon, Sukemune est un célèbre forgeron appartenant à l’école Shimada dans la province de Suruga. Cette tradition vit le jour au milieu du XVe siècle, sous l’impulsion du Shodai Yoshisuke, également connu sous le nom de « Gisuke ».
L’origine de ce dernier reste assez floue. Selon certaines chroniques de l’époque Edo, Yoshisuke aurait été un forgeron venant de Bizen pour s’installer en Suruga, alors que dans d’autres écrits, il est évoqué en tant que disciple caché du légendaire Masamune. Néanmoins, de part leur anachronisme et par manque de documents étayés, on sait que ces deux théories relèvent plus du mythe et demeurent sans réel fondement historique.
La piste la plus sérieuse indique que c’est sous la protection du clan Imagawa, et de son Daimyō Yoshitada (1436-1476), que la 1ère génération Yoshisuke développa son art et initia l’essor de l’école Shimada. Plus tard, il reçu à titre honorifique, le kanji 義 (Yoshi), pour la qualité de son travail. Parmi toutes ses œuvres léguées à la postérité, se trouve une lance (yari) d’une très grande importance nommée « Otegine ». Malheureusement, détruite lors de la seconde guerre mondiale, elle est toujours considérée comme l’une des trois grandes lances n’ayant jamais été forgées, et un trésor intangible du Japon.
Sukemune, tout comme son prédécesseur, laissa également un héritage important, comme une œuvre réalisée en collaboration avec le légendaire Muramasa, ou encore que le fameux tantō « Osoraku », dont l’un de ses plus illustres propriétaires ne fût autre que le grand seigneur de guerre Takeda Shingen, figure majeure du Sengoku-jidai à la fin du XVIe siècle.
Avis de Kojiki Gallery
Il est interessant de noter que ce katana a été gratifié d’un certificat d’enregistrement (tōrokushō) lors de la 26ème année de l’ère Showa, soit le 31 mars 1951. Or, cette date importante, appelée « l’année des Daimyō », correspond à la toute première initiative du gouvernement japonais, après le désastre de la seconde guerre mondiale, dans l’enregistrement et le répertoire de tous les nihontō traditionnels. Cette opération d’inventaire commença pour sa première année, exclusivement par les pièces constituant un patrimoine culturel important, dont la plupart firent partie des collections familiales d’anciens Daimyō.
De plus, la qualité exceptionnelle de cette pièce reflète l’attention particulière accordée à son entretien et à sa préservation au fil des ans. Cela se manifeste notamment par le récent polissage de la lame réalisé par un grand maître togishi et par le raffinement des éléments du koshirae. Il est fort probable que ce katana puisse prétendre à une certification juyō à l’avenir, et il est indéniable qu’il saura combler les attentes d’un collectionneur averti à la recherche d’un nihontō prestigieux.